Selon le cabinet britannique Frost & Sullivan, la lignine pourrait devenir la principale source de composés aromatiques renouvelables de l’industrie chimique dans l’avenir. Les premières opportunités pourraient voir le jour dès 2015 avec la substitution directe du phénol dans la plupart de ses applications industrielles : les résines phénoliques, les agents tensioactifs, les résines époxy, les adhésifs ou les polyesters. Soit un marché évalué à plus de 130 milliards de dollars par le cabinet.
Pionnier dans le domaine, le projet NEOLIGNOCOL, porté par RESCOLL à la demande de l’UIPP (syndicat patronal français de l’industrie du panneau), vise la mise au point de liants pouvant substituer totalement ou partiellement les 5 MT de résines formophénoliques aujourd’hui utilisés annuellement pour la fabrication de panneaux.
« L’industrie commence à peine à entrevoir le potentiel de la lignine », explique Nicolas Smolarski consultant pour Frost & Sullivan : « C’est la seule source renouvelable pour la production industrielle d’aromatiques et elle est décorrélée de la fluctuation du prix du pétrole. » Le cabinet ajoute que la lignine représente 30% de tout le carbone organique non fossile sur la Terre. Sa disponibilité serait supérieure à 300 milliards de tonnes, et elle augmenterait de 20 milliards de tonnes annuellement. Environ 20 à 35 % en poids de la lignine sont contenus dans le bois, aux côtés de ses autres constituants que sont la cellulose et l’hémicellulose. C’est en revanche un polymère de structure beaucoup plus complexe, considéré de longue date comme un matériau à faible valeur ajoutée. En 2010, l’industrie papetière a produit à elle seule environ 50 millions de tonnes de lignine, dont seulement 2 % (1 Mt) ont pu être valorisés en produits chimiques tels que des agents de dispersion ou des liants. Le reste a été brûlé. Dans l’ensemble, l’activité lignine représente un chiffre d’affaires de près de 300 millions de dollars. Cependant, le développement de technologies pourraient permettent l’extraction de lignine de plus haute pureté qui pourrait ensuite être convertie en divers produits de plus forte valeur ajoutée, tels que le BTX (mélange de benzène, toluène et xylène), le phénol, la vanilline ou la fibre de carbone.
N. Smolarski explique qu’une des forces de la lignine est qu’elle peut être utilisée directement pour produire des molécules « drop in » dans les procédés pétrochimiques existants, mais elle peut aussi contribuer à créer des synthons innovants. Cependant pour libérer tout ce potentiel de la lignine, des verrous restent à lever. Frost & Sullivan fait état d’une faible maturité de la technologie, du peu de partenariats de recherche académique et industrielle, de fonds publics monopolisés par les biocarburants, et d’un manque de financements au niveau des bioraffineries. « Tous ces facteurs limitent l’émergence d’applications de la lignine à des coûts compétitifs » estime-t-il. Dans son étude, Frost & Sullivan en appelle au passage à l’action de l’industrie pétrochimique. « L’industrie pétrochimique détient de loin la plus grande capacité à accélérer l’émergence de produits chimiques à base de lignine. Être le premier moteur de ce marché peut assurer le leadership technologique, les partenariats stratégiques et un avantage concurrentiel » conclut Nicolas Smolarski.
Source : Formule Verte
Pour télécharger l’étude : High-value Opportunities for Lignin – Unlocking its Potential – Market Insights